Une activité réglementée
Les pêches maritimes sont l’une des dernières activités de chasse. Pratiquées depuis toujours dans le milieu naturel de la mer, marquées par des traditions et des valeurs qui leurs sont propres, ce sont des activités dépendant des aléas des stocks, des aléas économiques, des conditions météorologiques et à forts enjeux environnementaux.
En 2021, on dénombrait en France 6 256 navires armés à la pêche, représentant 8,3 % des navires composant la flotte de pêche des Etats membres de l’Union européenne, 17,8% de la puissance motrice et 13,1% de la jauge brute qui permettent de calculer les capacités de capture.
Depuis 1983, la pêche maritime est encadrée par les mesures de la politique commune des pêches (PCP) de l'Union européenne édictées pour ajuster l'effort de pêche aux stocks de poissons sauvages disponibles afin d’en assurer le renouvellement et, au final, de contribuer au maintien de la filière. La PCP comporte des mesures pour la gestion des stocks de poissons et des navires dont elle encadre les capacités de capture : tailles minimales des captures, fermeture de stocks ou de zones, interdiction de certains dispositifs réduisant la taille des mailles des chaluts par exemple. La PCP est régulièrement révisée et, depuis 2002, elle a également pour objectif de permettre une exploitation durable des ressources aquatiques vivantes.
L’armateur mais aussi le patron (capitaine) et le second capitaine doivent avoir connaissance de la réglementation technique qui s’appliquent à leurs zones et engins de pêches ainsi qu'aux captures. Des obligations en matière de déclarations de captures ou d’entrées et sorties de zones de pêche sont par exemple prévues. Des contrôles permettent de vérifier le respect de la réglementation.
Les modalités de commercialisation des captures sont très variables selon le type de pêche pratiquée. Dès la débarque (au port du navire ou en base avancée voire par transbordement en mer), toute la filière de vente du poisson est également encadrée dans le cadre de l’organisation commune du marché (OCM), qui est un aspect de la PCP. Ainsi, le code rural et de la pêche maritime prévoit et encadre un certain nombre d’acteurs de la filière de commercialisation des captures, qui peut se faire en criée ou en circuit court, par exemple au cul du bateau.
♦ Consultez :
• la page « Pêche et aquaculture » sur le site du ministère chargé de la mer
• Les fiches thématiques de l’Union européenne sur la politique commune des pêches
• Les fiches thématiques de l’Union européenne sur l’organisation du marché des produits de la pêche et de l’aquaculture
Des activités très variées
Les zones de pêche s'étendent des côtes françaises de la Manche, de l'Atlantique, de la Méditerranée et de l'Outre-mer jusqu'au large de l'Écosse, de l'Irlande, du Groenland, de l'Espagne, de l'Afrique mais aussi en Océan Indien et en Antarctique. Ces zones sont répertoriées, classées et des réglementations sur les espèces s’y appliquent dans le cadre de la PCP ou de conventions régionales ou de gestion de certains stocks. Outre les zones de pêches et les espèces ciblées, la durée des marées et les engins de pêche contribuent également à la diversité des activités et impactent la composition des équipages, en nombre et qualifications.
Durée des marées
Une marée est la durée de la sortie en mer pour se rendre sur la zone de pêche, capturer les espèces et rentrer au port pour débarquer les captures. Plus les zones de pêche sont lointaines, plus le navire sera grand, adapté et équipé pour partir loin.
Les navires à la pêche sont armés en plusieurs genres de navigation. En fonction du genre de navigation associé au permis d’armement du navire, les marins sont plus ou moins nombreux à bord et titulaires de qualifications différentes, conformément à l’effectif minimal de sécurité. Un même navire peut disposer de plusieurs genres de navigation pour pouvoir cibler des espèces différentes selon les saisons.
La petite pêche
Les navires armés à la petite pêche effectuent des marées de 24 heures au plus. La petite pêche est pratiquée le long des côtes, en général avec un équipage de trois ou quatre hommes, sur des navires d’une longueur inférieure à 16 mètres. Les poissons sont débarqués frais et vendus à la criée pour être revendus au détail en poissonnerie ou transformés, ou sont vendus en vente directe auprès de restaurateurs ou au marché, par exemple.
La petite pêche côtière est une pêche artisanale à forte valeur ajoutée compte tenu des espèces capturées et de leur fraîcheur au moment de la débarque. Ces navires ne pêchent pas toute l’année avec les mêmes engins pour tenir compte de la saisonnalité des espèces. Ils peuvent ainsi alterner le filet et le casier par exemple.
La pêche côtière
Les navires armés à la pêche côtière effectuent des marées comprises entre 24 et 96 heures (quatre jours). Les navires, en général d’une longueur inférieure à 16 mètres, embarquent quatre ou cinq hommes d’équipage et s’éloignent plus des côtes qu’à la petite pêche. Le poisson est traité à bord : il est vidé, lavé et glacé avant d’être mis en cale dans des caissettes ou en vrac.
La pêche côtière est une pêche artisanale intensive. Comme pour la petite pêche, les navires à la pêche côtière ne pêchent pas toute l’année avec les mêmes engins. Par exemple, les navires pratiquant le chalut et ciblant la sardine peuvent pratiquer la drague en période de coquille saint-Jacques. Il peut aussi s’agir de navires qui pêchent au filet plusieurs espèces et qui, pendant les mois chauds dans le Golfe de Gascogne, s’équipent à la bolinche ou à la canne pour pêcher le thon rouge sur sa route de migration.
La pêche au large
Les navires armés à la pêche au large effectuent des marées supérieures à 96 heures qui n’entrent pas dans les critères de la grande pêche. On parle aussi de « pêche hauturière ». En général, les marées durent aux alentours de douze jours. Les navires sont surtout des chalutiers de plus de 24 mètres, hauturiers ou semi-hauturiers. Il peut aussi s’agir de navires pratiquant d’autres techniques de pêche comme la senne, selon les espèces. Une fois capturés, les poissons sont traités et congelés à bord ou bien mis en glace dans les cales du navire pour être ensuite vendus à la criée.
A bord, les équipages varient selon la technique de pêche mais, en général, se composent de cinq à huit hommes.
La grande pêche
Les navires armés à la grande pêche sont :
- les navires de pêche d'une jauge brute égale ou supérieure à 1200 (UMS) ;
- les navires de pêche d'une jauge brute égale ou supérieure à 200 (UMS) s'absentant habituellement plus de vingt jours de leur port d'exploitation ou de ravitaillement.
Cette pêche « industrielle » est pratiquée sur des navires de 50 à 80 mètres de long. A bord, l’équipage peut compter jusqu'à 50 hommes. Le poisson est traité de manière plus technique que sur les navires pratiquant des marées plus courtes. Les espèces capturées et les engins de pêche varient également selon les zones de pêche :
- les chalutiers font route vers les eaux froides de l’Atlantique nord pour pêcher le lieu noir, le cabillaud ou la lingue ;
- les thoniers ciblent le thon rouge ou la bonite dans des eaux chaudes de Méditerranée, de l’Océan Indien depuis les Seychelles ou au large des côtes de l’Afrique de l’ouest ;
- les palangriers partent pour des campagnes de trois mois pêcher la légine en Antarctique, à partir de bases avancées situées à La Réunion.
Le poisson est vidé, lavé et congelé ou glacé à bord. Dans le cas du thon rouge, compte tenu de sa valeur, il peut être transbordé en mer sur des navires qui conduiront les captures au port ou dans des zones de stockage en pleine mer.
Les techniques de pêche
Il existe de très nombreuses techniques de pêche, parfois très locales, selon les espèces ciblées, la configuration des côtes ou le circuit de commercialisation. Le même poisson peut parfois être pêché avec des techniques différentes, comme le thon rouge qui peut être capturé à la bolinche (filet circulaire) ou à la canne dans le sud du Golfe de Gascogne. On distingue principalement entre les arts traînants qui sont tirés dans la mer, et les arts dormants qui sont posés en mer. Chaque engin de pêche nécessite un équipement spécifique à bord ainsi qu’une connaissance du « métier » par les membres de l’équipage.
Pour la capture des poissons
Les engins de pêche les plus utilisés sont :
- les chaluts (filets en forme d'entonnoir fermés au bout et tirés par le navire) : chaluts de fond pour capturer des poissons vivant sur le fond (merlus, merlans par exemple) ou chaluts pélagiques pour la pêche en pleine eau (anchois, sardines par exemple) ;
- les sennes coulissantes (filets tournants) avec lesquels les navires encerclent les bancs de poissons en pleine eau ;
- les filets droits (nappes rectangulaires tendues vers le haut par une corde munie de flotteurs et vers le bas par une corde lestée) pour pêcher la sole et d'autres espèces nobles qui ne sont ainsi pas écrasées par cette technique ;
- les lignes (hameçons garnis d'un appât ou d'un leurre) ou les palangres (lignes de pleine eau garnies d'hameçons sur toute leur longueur) pour pêcher le bar par exemple.
Pour la captures des coquillages ou des crustacés
Les engins de pêche les plus utilisés sont :
- des casiers (ou « nasses ») constitués d'un treillis végétal, métallique ou plastique et munis d'entrées coniques par lesquelles le crustacé entre attiré par un appât. Les casiers sont relevés à chaque sortie en mer ;
- des dragues (poches aux mailles en textile ou en métal) traînées sur le fond pour capturer différents coquillages posés sur le fond (coquilles Saint-Jacques) ou enfouis dans le sable (praires, palourdes, coques par exemple).
♦ Consultez la rubrique « la pêche professionnelle » sur le site du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM)
Des conditions de travail et de vie spécifiques
Le métier de marin-pêcheur a ses propres spécificités : conditions météorologiques, espace limité à bord du navire à la fois lieu de travail et de vie, travail du poisson, rythme de travail sur zone de pêche et manoeuvre des engins de capture qui font de la pêche une activité physiquement exigeante... La pêche est un métier de liberté, de responsabilités et de solidarité, source de fierté.
La cohésion et la complémentarité de l'équipage sont essentielles pour assurer le bon déroulement d’une marée dépendant des conditions météorologiques, de la ressource, de la casse à bord... Chacun est un maillon essentiel de la sécurité et de l’efficacité de tous.
Le secteur de la pêche connaît de grandes variétés de situations et de conditions de travail. Le patron est le capitaine du navire. Il est responsable de l'expédition de pêche. Quand il est également le propriétaire et / ou l’armateur du navire, il assure également la gestion économique et financière de son entreprise. Sauf à la petite pêche, où le patron peut aussi être matelot ou mécanicien, un navire de pêche comprend en général un équipage et un encadrement avec au moins un patron et un chef mécanicien.
Sur beaucoup de navires, chaque membre de l’équipage (sauf le patron ou le marin assurant la veille) participe au traitement du poisson. En effet, le travail à la pêche comporte des fonctions et tâches concernant le navire mais aussi l’activité de pêche :
- la conduite du navire, qui comporte par exemple des fonctions et tâches relatives au quart à la passerelle et la manœuvre. La veille, surtout lorsque le navire est en action de pêche et est moins manoeuvrant, est essentielle pour assurer la sécurité, surtout lorsque les zones de pêche sont très fréquentées ;
- le service "machine", particulièrement sollicité. Outre la propulsion et l’entretien général du navire, il faut aussi préparer les apparaux de pêche, comme les treuils, avant d’arriver sur la zone de pêche, assurer ensuite leur fonctionnement permanent sur zone puis, si besoin, réparer sur la route du retour au port ;
- l’entretien du matériel de pêche requiert un savoir-faire particulier, avec la technique du ramendage des filets et des chaluts qui s’apprend en cours de formation en début de carrière ;
- sur la zone de pêche, le patron ou son second pont met en œuvre ses connaissances pour détecter le poisson, manœuvrer les engins de pêche et surveiller attentivement les opérations de pêche pendant lesquelles la sécurité des hommes est fondamentale. Une fois à terre, au retour, il supervisera la débarque des captures ;
- dès que les captures sont sorties de l’eau, elles sont traitées à bord. Elles sont triées et préparées selon les espèces et le mode de conservation avec l’éviscérage, le filetage, le conditionnement dans des caisses, le glaçage ou le salage puis le stockage en cale.
Des métiers de plus en plus qualifiés
La formation professionnelle maritime des marins pêcheurs est essentielle pour assurer la sécurité alors que la pêche est un secteur dangereux. Elle est aussi un vecteur de promotion professionnelle et sociale à laquelle les professionnels sont particulièrement attachés.
De plus, les navires de pêche font l'objet de progrès technologiques constants. Ainsi, l'évolution des équipements - notamment électroniques - et les performances des engins de capture ont permis d'améliorer la productivité, la sécurité au travail et la qualité des produits. En contrepartie, ils requièrent des qualifications de plus en plus pointues. L’aspect environnemental de la formation reçue tout au long de la carrière est également de plus en plus développé.
Les marins pêcheurs sont ainsi des techniciens de plus en plus qualifiés en même temps que des gestionnaires de la ressource.
La formation initiale à l’entrée dans la carrière, puis la formation continue tout au long de la vie professionnelle, permettent d'acquérir les connaissances techniques, biologiques et économiques nécessaires pour progresser dans la carrière. Elles favorisent aussi les « passerelles » vers les secteurs du transport et des services maritimes, de la grande plaisance, des cultures marines mais aussi à terre où les compétences de navigant sont recherchées dans l’ensemble de la filière de production.
Un droit du travail et une rémunération spécifiques
La spécificité du droit du travail est marquée à la pêche où s’appliquent des règles parfois différentes de celles du commerce ou de la plaisance professionnelle. Par exemple, la durée du travail et du repos est encadrée par des règles spécifiques. Les obligations en matière de santé et sécurité au travail et de prévention des accidents au travail sont renforcées pour prévenir les risques de noyade, par exemple avec le port du vêtement flottant intégré (VFI).
La rémunération à la part est spécifique à la pêche, née à l’époque où chaque participant à la campagne de pêche en tirait profit en fonction de sa participation financière initiale à l’opération. La rémunération à la part, qui est une forme de rémunération variable, peut être combinée avec une forme fixe de rémunération. Elle n’est pas la seule modalité de rémunération. Le SMIC est garanti par la réglementation.
La rémunération à la part est calculée ainsi :
• prix de vente des captures (produit brut) – les frais communs (carburant, huile, glace…les frais communs sont définis réglementairement) = produit net à répartir ;
• le produit net est réparti entre la part de l’équipage d’un côté et la part de l’armement de l’autre, exprimées en % ;
• rémunération du marin : elle correspond au nombre de parts attribué au marin et mentionnées dans son contrat d'engagement maritime, prélevées dans la part équipage (elles dépendent de la fonction à bord).
La pêche à pied
La pêche professionnelle ne se pratique pas qu'à bord d'un navire. Elle peut se pratiquer à pied depuis la côte dans un cadre spécifique : la pêche à pied à titre professionnel. Son exercice est soumis à conditions, notamment la détention d’un permis de pêche à pied et le respect de certaines obligations en matière de commercialisation et de transport.
Le demandeur d’un premier permis de pêche à pied doit justifier d’un projet professionnel et de sa capacité professionnelle par la réalisation d’un stage de formation.
Le permis de pêche à pied a une durée de validité de douze mois et doit faire l’objet d’une demande de renouvellement.